ISSN 2421-5813

Résumé  Rédigés entre 1959 et 1965, L’Image, Comment c’est et Imagination morte imaginez représentent un moment charnière dans l’œuvre narrative de Beckett. Pris dans l’impasse de L’Innommable, ce dernier cherche des voies nouvelles afin de poursuivre ses expérimentations sur la voix narrative, en tentant d’enrayer le processus imaginatif à l’œuvre dans la création littéraire. L’écriture de ces trois textes repose ainsi sur un mouvement contradictoire de construction et de déconstruction de l’univers fictif, dans lequel l’imagination du lecteur est amenée à jouer un rôle essentiel.

Mots-clés  Beckett – imagination – narration – Comment c’estImagination morte imaginez – L’Image

Abstract  Written between 1959 and 1965, L’Image, How It Is and Imagination Dead Imagine mark a turning point in Beckett’s narrative work. Trapped into The Unnamable, he seeks new ways to carry on his experiments on the narrative voice in an attempt to disrupt the imaginative process of literary creation. This three pieces of work construct and deconstruct the narrative world, engaging the imagination of the reader in the contradictory movement of their writing.

Keywords  Beckett – imagination – narrative – How It Is – Imagination Dead Imagine – L’Image

Avec L’Innommable, cette « expérience littéraire extrême »[1], Beckett met à l’épreuve les limites du champ romanesque en infligeant au langage et au récit un traitement radical. Tout en démantelant les éléments constitutifs de la fiction que sont le système des personnages et le cadre spatio-temporel, il discrédite la voix narrative en la réduisant à un monologue bégayant. Plongé comme son narrateur « dans l’impasse, ne sachant plus quoi dire, mais continuant à dire », l’écrivain « touche désormais au silence »[2]. Près de dix ans après avoir mis le point final à ce roman, il confie à son ami A.J. Leventhal son sentiment d’avoir atteint le fond du gouffre et sa lutte laborieuse pour rédiger un texte en prose qui soit à nouveau substantiel : «  [je me] bats pour me battre avec ce sur quoi L’Innommable m’a laissé, soit avec ce qui est au plus près du rien »[3]. Dans ce contexte d’inertie, l’écriture de Comment c’est[4] est le fruit d’une gestation douloureuse : « un an et demi durant sa vie entière tourne autour de cette œuvre essentielle : il lui faut plus d’une année pour l’écrire, six mois encore pour la revoir, et c’est en substance la seule chose qui l’occupe »[5]. Comment c’est est notamment composé à partir de L’Image[6], court texte en prose sans ponctuation ni paragraphe produit à la fin des années cinquante. Beckett reprend ce bref fragment narratif, en développant le motif du narrateur immergé dans la boue. Innocemment étiqueté « roman » par les Éditions de Minuit lors de sa publication en français en 1961, cette œuvre représente un bouleversement certain dans l’univers narratif beckettien : « it is a much more strenuous and prolonged exercise in “de-familiarization” than any of Beckett’s subsequent prose works can match, and yet a work which reveals its guiding principles with a disarming casualness »[7]. Cependant, alors qu’il soumet la prose de Comment c’est à un processus de segmentation typographique et de réduction syntaxique qui tend à abstraire la narration, Beckett pousse encore plus loin le démantèlement de la fiction romanesque dans Imagination morte imaginez[8]. Quatre ans après la publication de Comment c’est, la rédaction de ce court texte sur « ce qui ne sera pas écrit »[9] est une gageure : « Mille mots. Six mois de ratures »[10]. De L’Image et Comment c’est à Imagination morte imaginez, l’auteur de L’Innommable cherche des voies nouvelles afin de poursuivre son entreprise narrative, en interrogeant plus particulièrement le processus imaginatif à l’œuvre dans la création littéraire. Loin de faire de l’image une création poétique, pur produit de l’esprit, il tente de capter et de retranscrire le processus qui mène à son apparition. Il utilise en cela le texte comme un dispositif optique capable de reproduire dans l’imagination des lecteurs les images nées dans l’esprit de l’auteur. Pourtant si les mots permettent à la pensée de l’auteur de se déployer, ils risquent aussi de figer les images qu’elle crée en les emprisonnant dans le tissu du texte. Le langage est un outil nécessaire à l’expression littéraire, mais il constitue aussi pour Beckett un piège qu’il convient de déjouer, de « discréditer », en « y for[ant] un trou après l’autre »[11], afin de dissoudre « la matérialité terriblement arbitraire de la surface des mots »[12]. Aussi les images beckettiennes tendent-elles à tromper les facultés intellectuelles et à rompre avec le réel, pour s’élaborer dans le creux du logos, au-delà de la parole et de la raison, dans un espace indistinct où elles conservent toute leur force originelle : « L’image beckettienne est comparable, comme les tableaux de Bram van Velde, à une “insurrection des molécules” dans le mouvement du vide qui donne à voir la chose elle-même, en suspens entre sujet et objet, entre être et non-être »[13]. Dans les textes narratifs rédigés à la suite de L’Innommable, Beckett cherche donc à appréhender « l’image essentielle, ou dernière, (…) image-éclipse entre être et non-être, où l’unité se diffracte paradoxalement dans une pluralité indéterminable »[14]. Il suscite l’émergence d’une vision en activant son imagination et en la désactivant aussitôt, afin de saisir l’image dans l’instant zéro. L’écriture passe alors pour lui par des phases successives d’imagination et de « désimagination ». Ainsi, la composition de ces trois textes, L’Image, Comment c’est et Imagination morte imaginez, repose sur un mouvement contradictoire de construction et de déconstruction de l’univers narratif.

1. La construction de l’univers narratif

À la base de l’écriture de ces textes en prose, il y a tout d’abord l’imagination créatrice, c’est-à-dire la faculté de former des images d’objets irréels ou non perçus. Le titre Imagination morte imaginez est programmatique à cet égard, puisqu’il vise « à montrer à quoi ressemble l’imagination morte, ou plutôt ce qu’il reste de l’imagination quand elle imagine sa propre mort »[15]. À partir de ce postulat paradoxal, le texte reprend le motif de la rotonde blanche à un fragment de prose écrit en anglais en 1963-1964 et intitulé All Strange Away[16]. Rédigé « sur le chemin rocailleux de Imagination morte imaginez »[17], ce court écrit fait écho par son titre à la réplique « ici tout est étrange » de Oh les beaux jours ou, comme le souligne également Stanley Gontarski, « à la Genèse, 35-2, “Put away the strange gods that are among you” (« Chassez les idoles étrangères qui sont parmi vous »)[18]. Évacuant tous les repères réalistes des lecteurs, Imagination morte imaginez développe la description minutieuse d’une rotonde blanche, un objet irréel et abstrait parfaitement délimité. La narration revêt une précision mathématique, notant dès le début du texte : « Diamètre 80 centimètres, même distance du sol au sommet de la voûte. Deux diamètres à angle droit AB CD partagent en demi-cercles ACB BDA le sol blanc. Par terre deux corps blancs, chacun dans son demi-cercle. Blancs aussi la coûte et le mur rond hauteur 40 centimètres sur lequel elle s’appuie »[19]. Dans cet univers géométrique, les deux corps figés sont positionnés à l’intérieur des demi-cercles par rapport aux points fixes de la rotonde. Cependant, les lecteurs sont engagées dans une visite en mouvement par l’emploi de verbes à l’impératif tout au long de la narration : « Ressortez, reculez, elle disparaît, survolez, elle disparaît, toute blanche dans la blancheur, descendez, rentrez »[20]. Ce mode verbal implique les lecteurs dans la construction de l’univers fictif, tout en conférant un certain dynamisme à l’image. La rotonde acquiert ainsi un plus grand degré de réalité, si bien que d’abstraite elle devient presque concrète dans l’esprit des lecteurs. À la blancheur de cette figure géométrique, Comment c’est oppose un univers fait de noir et de boue :

Un homme est allongé dans la boue et le noir, il halète en se murmurant sa “vie” telle que l’énonce obscurément une voix qui parle en lui. Ce qu’elle raconte est décrit tout au long de l’œuvre comme le souvenir fragmentaire d’une voix extérieure, “quaqua de toutes parts”, entendue autrefois dehors. Dans les dernières pages, force lui est d’en assumer la responsabilité, et avec elle celle de la lamentable histoire qu’elle raconte. Le bruit de son halètement lui résonne aux oreilles, et ce n’est que lorsqu’il faiblit qu’il perçoit et reprend dans un murmure un fragment de ce qui s’énonce en lui. Le livre comprend trois parties : d’abord un voyage solitaire dans le noir et la boue qui s’achève sur la découverte d’une créature similaire, appelée Pim ; puis la vie avec Pim, lui aussi immobile dans le noir et la boue, qui prend fin avec le départ de Pim ; enfin la solitude immobile dans le noir et la boue. C’est dans la troisième partie que surgit la voix dite “quaqua”, intériorisée et murmurée quand le halètement s’arrête. Autrement dit, le “je” est dès le départ présent dans la troisième partie, la première et la deuxième, bien qu’il s’énonce comme entendu dans un présent déjà passé.[21]

L’existence entière du personnage est ainsi réduite à la boue. Son passé, son présent et son futur sont neutralisés par cette substance, que la narration présente dès le début de la première partie comme matricielle : « tiédeur de boue originelle noir impénétrable »[22]. Dès le début de L’Image, la boue est déjà au cœur du processus créatif :

La langue se charge de boue seul remède alors la rentrer et le tourner dans la bouche la boue l’avaler ou la rejeter question de savoir si elle est nourrissante et perspectives sans y être obligé par le fait de boire souvent j’en prends une bouchée c’est une de mes ressources la garde un bon moment question de savoir si avalée elle me nourrirait et perspectives qui s’ouvrent ce ne sont pas de mauvais moments me dépenser tout est là la langue ressort rose dans la boue.[23]

Le mouvement de la langue qui absorbe la boue pour l’avaler ou la régurgiter est métaphorique du processus créatif. Ainsi, la narration se nourrit de cette fange et y trouve justement la matière pour développer une image. Le texte s’organise autour de cette vision qui illumine ce monde de ténèbres, jusqu’à satiété : «  La langue ressort va dans la boue je reste comme ça plus soif la langue rentre la bouche se referme elle doit faire une ligne droite à présent c’est fait j’ai fait l’image »[24]. Le narrateur de Comment c’est a aussi coutume de se mettre sur le ventre pour boire la boue : « ça dure un bon moment ce sont de bons moments peut-être les meilleurs comment choisir le visage dans la boue la bouche ouverte la boue dans la bouche la soif qui se perd l’humanité reconquise »[25]. La boue nourrit son esprit et donne parfois naissance à ce qu’il appelle « une belle image »[26]. Bien que Comment c’est, L’Image et Imagination morte imaginez se construisent à partir d’imaginaires complétement opposés, les univers narratifs de ces textes s’apparentent à des huis-clos immuables au sein desquels se déploie la fiction littéraire. Le brouillage spatio-temporel rompt avec le réel et avec les codes narratifs traditionnels, pour plonger les lecteurs dans des mondes inédits, purs produits de l’imagination créatrice de l’auteur.

Pourtant, si ces univers semblent ex nihilo, ils sont en fait bâtis autour de fragments, bribes et autres images préexistantes. En effet, l’imagination reproductive intervient également dans la création, en ce qu’elle permet d’évoquer des images d’objets déjà perçus ou passés. L’absorption de la boue dans L’Image suscite un souvenir personnel, où le narrateur alors jeune adolescent se trouvait dans la campagne en compagnie de sa bien-aimée : « soudain là sous la boue je me vois je dis me comme je dis je comme je dirais il parce que ça m’amuse je me donne dans les seize et il fait pour comble du bonheur un temps délicieux »[27]. Le détachement du narrateur relègue cette vision à un passé archaïque et définitivement révolu. L’émergence du souvenir repose sur le travail de l’imagination, qui vient réactiver et reconfigurer la scène pour combler les oublis et parties manquantes. Progressivement, l’image prend vie, les personnages s’animent et l’arrière-plan se précise : « et naissance peu à peu de taches grises et blanches auxquelles je ne tarde pas à donner le nom d’agneaux »[28]. La notation « bref brouillard »[29] indique la transition d’une image à une autre dans un effet de fondu enchaîné. Les personnages semblent ainsi prendre vie à travers ces visions muettes qui se succèdent, à l’instar d’un film de souvenirs. Mais la narration prend fin dès lors que la vision s’obscurcit : « c’est fini c’est fait ça s’éteint la scène reste vide quelques bêtes puis s’éteint »[30]. Le court texte en prose de L’Image s’articule tout autour de l’émergence puis de la disparition de cette vision fugace. Celle-ci est justement reprise dans Comment c’est et décrite comme étant « la dernière »[31]. Elle cristallise en son sein des embryons d’images évoqués précédemment par la voix narrative, comme la couleur bleu et les nuages[32], si bien qu’elle représente la vision la plus aboutie du livre. L’image s’éteint de la même façon dans les deux textes, mais Bruno Clément note l’importance de la variante de Comment c’est qui remplace le syntagme « j’ai fait l’image »[33] par « j’ai eu l’image »[34]. À travers l’usage du verbe avoir, l’image « emprunte à la fantaisie son caractère passif, puisqu’elle est subie, perçue, reçue, vue, par le sujet qui n’y peut rien »[35]. Le narrateur n’est plus responsable de la fonction poétique du langage et l’image semble exister comme une entité indépendante. En effet, la voix narrative de Comment c’est « cite »[36], comme elle le déclare dès les premiers mots du texte, la voix « quaqua »[37] qui fait entendre quelques bribes de sa propre vie. Le récit nécessite un effort incessant de la part de l’imagination pour subsister : « on est là quelque part en vie quelque part un temps énorme puis c’est fini on n’y est plus puis de nouveau on est là de nouveau »[38]. Dans la deuxième partie, le narrateur torture Pim pour « [se] gaver de ses fables »[39] tandis que, dans la troisième partie, ce sont des milliers de bourreaux qui extorquent des fragments de passé de leurs victimes pour se les approprier. L’imagination reproduit ce schéma à l’infini et, pour complexifier encore un peu plus la transmission de la parole, elle invente deux autres avatars, « le témoin penché sur moi nom Kram penché sur nous de père en fils en petit-fils »[40] et « le scribe nom Krim générations de scribes tenant le greffe »[41]. Mais l’univers narratif de Comment c’est est aussi inspiré du chant VII de L’Enfer : « auditeur et scribe Dante rapporte les mots par lesquels Virgile, témoin et locuteur, reconstitue le murmure collectif et inaudible des damnés plongés dans la palude stygienne : une parole empêchée, réduite à des bulles affleurant à la surface de la boue »[42]. James Knowlson remarque également que les deux corps placés de dos dans Imagination morte imaginez évoquent la position des « damnés de Dante qui, “verso recto”, la tête à l’envers, “baignent leurs fesses de leurs larmes” »[43] dans le chant XX de L’Enfer. Pour le biographe, Beckett possédait une mémoire visuelle extrêmement développée, qui enregistrait des images variées pour les assimiler et les ingurgiter, parfois de longues années plus tard, dans le corps de la fiction, grâce à l’imagination. Il note ainsi que, malgré son aspect énigmatique, Imagination morte imaginez contient « à l’état résiduel des échos de notre ici-bas »[44] :

La rotonde s’élève au-dessus d’un mur haut d’une trentaine de centimètres, tel un mausolée en réduction (dans All Strange Away, Beckett en parle comme du Panthéon ou de ces tombes collectives creusées d’alvéoles). C’est un “caveau”, inspiré, précise Avigdor Arikha, par les coupoles de l’église du Val-de-Grâce que Beckett voit de la fenêtre de son bureau, ici miniaturisées, transférées de l’expérience réelle à l’“expérience imaginative”.[45]

Au final, la création littéraire repose sur une imagination reproductrice, qui se nourrit des expériences et des images diverses que la mémoire a enregistrées pour construire un univers fictif inédit. Mais, à l’instar des corps d’Imagination morte imaginez qui s’apparentent à « des embryons qui attendraient de naître ou de mourir »[46], chaque image en germe dans le texte peut naître dans l’esprit du lecteur ou mourir, achevée par la mécanique implacable de la narration.

2. La déconstruction de l’univers narratif

Ces textes en prose ont la capacité de se déconstruire eux-mêmes, en ce qu’ils recèlent un véritable pouvoir d’implosion. Dans Imagination morte imaginez, la voix narrative se trahit lorsqu’elle déclare : « il est cependant clair, à mille petits signes trop longs à imaginer, qu’ils ne dorment pas »[47]L’imagination n’est pas morte et le pacte de lecture semble ainsi rompu. La voix narrative cherche alors à mettre fin à son discours, en voulant se rectifier et détourner l’attention des lecteurs, mais elle demeure incohérente jusqu’au bout :

Laissez-les là, en sueur et glacés, il y a mieux ailleurs. Mais non, la vie s’achève et non, il n’y a rien ailleurs, et plus question de retrouver ce point blanc perdu dans la blancheur, voir s’ils sont restés tranquilles au fort de cet orage, ou d’un orage pire, ou dans le noir fermé pour de bon, ou la grande blancheur immuable, et sinon ce qu’ils font.[48]

À travers ce mouvement d’autocorrection du texte, on retrouve l’épanorthose, figure de rhétorique qui selon Bruno Clément joue un rôle macrostructural au sein de l’œuvre beckettienne. Dans L’œuvre sans qualité, il définit justement l’épanorthose comme une figure de l’écart comparable à « une sorte de miroir : la figure qui figure la figure »[49]:

L’épanorthose, qui n’est pas un couple, mais dont la fonction est précisément de mettre en rapport les deux termes possibles d’une vérité qui ne rencontrera jamais d’expression plus adéquate que le mouvement qu’elle crée entre eux, l’épanorthose n’est pas seulement la solution de compromis qu’adopterait l’œuvre dans l’ordre de l’elocutio ; elle est peut-être, justement parce qu’elle est une figure, c’est-à-dire une forme, et qu’elle peut à ce titre recevoir tous les contenus, ce qui donne à l’œuvre beckettienne son mouvement essentiel.[50]

L’épanorthose traduit en terme stylistique le rapport de Beckett à l’image, expliquant par là-même le mouvement contradictoire de construction et de déconstruction qui anime ses textes : « en conjuguant l’énonciation d’une chose et sa mise en suspens, elle constitue l’image beckettienne : le donné-perçu apparaît dans le geste même de son effacement »[51]En se corrigeant elle-même la voix narrative d’Imagination morte imaginez cherche donc à quitter la rotonde, en détruisant la vision qu’elle venait minutieusement de construire. Ainsi, le texte amorce un mouvement de recul vis-à-vis de l’image qu’il était en train d’ébaucher et s’interrompt lui-même, mettant fin à son développement dans une tentative ultime pour enrayer toute forme d’imagination. Comme une hallucination, la rotonde s’évanouit dans la blancheur de la page et la mise à mort de l’imagination marque la mise à mort de la littérature. De la même façon, le texte de Comment c’est implose en lui-même lorsque le narrateur évoque dans la troisième partie l’incomplétude de son texte :

[…] impression fugitive je cite qu’à vouloir présenter en trois parties ou épisodes une affaire qui à bien y regarder en comporte quatre on risque d’être incomplet

qu’à cette troisième partie qui s’achève enfin devrait normalement s’ajouter une quatrième où l’on verrait entre mille autres choses peu ou pas visibles dans la présente rédaction cette chose

à ma place à moi en train d’enfoncer l’ouvre-boîte dans le cul de Pim Bom en train de l’enfoncer dans le mien

et au lieu des cris de Pim sa chanson et sa voix extorquée entendrait semblables à s’y méprendre les miens les miennes

mais nous ne verrons jamais Bom à l’œuvre haletant dans le noir la boue je resterai en souffrance la voix étant ainsi faite je cite que de notre vie totale elle ne dit que les trois quarts.[52]

Le narrateur déjoue les attentes des lecteurs, en soulignant les insuffisances de son discours. Un peu plus loin, il corrige encore ce qu’il vient d’énoncer en déclarant : « des quatre trois quarts de notre vie totale dont elle dispose deux seuls se prêtent à communication »[53]. Pour lui, « le même spectacle »[54] se reproduit indéfiniment, de sorte qu’il suffit d’annoncer l’épisode de Bom plutôt que de le décrire avec précision. Il souligne ironiquement que « deux rédactions [sont donc] possibles la présente et l’autre qui commencerait là où celle-ci finit enfin et par conséquent finirait par le voyage dans le noir la boue »[55]. Suggérant la possibilité de lire le récit à l’envers, son discours nécessite un effort d’imagination de la part des lecteurs. Il déjoue les limites du logos en évoquant une infinité de combinaisons narratives, qui se déploie au-delà du texte écrit. De façon similaire, certaines caractéristiques de l’univers fictif construit dans Imagination morte imaginez échappent à l’emprise de la raison. Au début, la rotonde est ainsi baignée dans une lumière et une blancheur dont les sources ne sont pas apparentes. Le texte décrit ensuite longuement les variations de luminosité et de température mais, malgré la récurrence des montées et des chutes de la chaleur et de la lumière, le narrateur est forcé d’admettre que ce phénomène étrange n’est que le fruit du hasard :

Il arrive aussi, l’expérience le montre, que chute et montée s’interrompent, et cela à n’importe quel palier, et marquent un temps plus ou moins long d’arrêt, avant de reprendre, ou de se convertir, celle-là en montée, celle-ci en chute, pouvant à leur tour soit aboutir, soit s’interrompre avant, pour ensuite reprendre, ou de nouveau se renverser, au bout d’un temps plus ou moins long, et ainsi de suite, avant d’aboutir à l’un ou à l’autre extrême. Par de tels hauts et bas, remontées et rechutes, se succédant dans des rythmes sans nombre, il n’est pas rare que le passage se fasse, du blanc au noir et de la chaleur au froid, et inversement. Seuls les extrêmes sont stables.[56].

Dans cet univers rationnel, certaines modifications du cadre spatio-temporel échappent à la raison mathématique. De la même manière, le narrateur note plus loin que les corps « passeraient bien pour inanimés sans les yeux gauches qui à des intervalles incalculables brusquement s’écarquillent et s’exposent béants bien au-delà des possibilités humaines »[57]. L’ouverture des yeux demeure un mystère, comme si l’intériorité de ces êtres était insalissable par la narration. Tout se passe comme si cette dernière n’assumait plus les éléments fictifs créés, de peur de faire le jeu de l’imagination. Dans L’Image, la voix narrative interrompt brutalement le récit du souvenir amoureux : « j’ai envie de crier plaque-la là et cours t’ouvrir les veines »[58]. Ce commentaire ironique, qui est repris dans Comment c’est[59], déjoue l’écueil narratif du cliché amoureux, en instaurant une rupture totale entre le narrateur et le jeune homme qu’il était dans un passé lointain. Rattrapé par l’image de soi, le narrateur coupe court au récit de cette romance et la vision évoquée n’est qu’imparfaitement esquissée. Ainsi, l’image beckettienne est :

processus plutôt qu’objet, [elle] est un rapport complexe à distinguer, à énoncer, tant l’un et l’autre du sujet et de l’objet entre lesquels elle constitue l’impossible jonction se révèlent eux-mêmes mouvants et permutables, eux-mêmes rapports, d’espace et de temps, à l’intérieur de l’infini réseau imaginaire.[60]

En somme, les textes de L’Image, Comment c’est et Imagination morte imaginez interrompent le développement des images dans un mouvement de « désimagination », pour éviter que les visions ainsi créées ne deviennent trop précises. Les images résistent ainsi à l’identification et demeurent en suspens. À l’instar de la peinture de Bram Van Velde, l’écriture beckettienne cherche à provoquer « une prise de vision »[61], afin de saisir la chose en suspens « telle qu’elle est, figée réellement. […] La chose immobile dans le vide, voilà enfin la chose visible, l’objet pur »[62].

L’écriture de ces trois textes repose plus largement sur la déconstruction de l’imaginaire littéraire traditionnel. Au début de Imagination morte imaginez, le texte évacue les clichés du discours littéraire : « Îles eaux, azur, verdure, fixez, pff, muscade, une éternité, taisez »[63]. La rotonde revêt alors l’apparence d’un crâne : « rentrez, frappez, du plein partout, ça sonne comme dans l’imagination l’os sonne »[64]. Le récit nous fait pénétrer à l’intérieur de la conscience créatrice, dans le cerveau de l’auteur où les images enregistrées par la mémoire ne sont encore qu’une matière brute inexplorée. La rotonde représente ainsi « le foyer irréductible de l’imagination »[65], quand cette dernière suppose sa propre extinction. De plus, Comment c’est démantèle le discours littéraire en portant atteinte à la langue :

Le style passe des périodes ponctuées et réparties en paragraphes à l’accumulation de mots scandée par des virgules, pour aboutir à une grammaire minimale, à dominante parataxique et nominale, en l’absence de toute ponctuation : « tâcher d’entendre quelques vieux mots par-ci par-là les coller ensemble une phrase quelques phrases » (p. 169)[66]

Beckett cherche à dissoudre « la matérialité de la surface des mots »[67], comme il en est question dans la lettre allemande de 1937. Le texte évoque, par la suite, l’existence d’un petit calepin, ignorée par le scribe de l’histoire : « Petit calepin à part ces notes intimes petit calepin à moi effusions de l’âme au jour le jour c’est défendu un seul grand livre et tout dedans Krim s’imagine que je dessine quoi paysages visages aimés oubliés »[68]. A travers cette ironie méta-discursive, le narrateur suggère que le livre reste incomplet et que la vérité de son être se trouve à côté du véritable texte, dans un petit carnet inaccessible. L’autoréférentialité du texte exhibe son propre inachèvement. Dès lors, le lecteur joue un rôle essentiel dans « cette paradoxale ventriloquie livresque »[69]:

Dans la mesure où il ré-cite la citation, le lecteur personnifie le narrateur qui « personnifie » (p.176) la voix. Celui qui lit redonne voix aux mots que le narrateur répète et, comme lui, il assume la voix, ne fût-ce que pour la dissiper : comme lui chambre d’écho d’un murmure, il incarne une voix sans corps et devient à son tour « défendeur d’une parole retrouvée dans le noir la boue là rien à corriger » (p. 218).[70]

Comment c’est repense ainsi le rôle du lecteur, le conviant à compléter librement la fiction du livre. Son imagination investit donc les paragraphes spasmodiques de la prose pour les faire sonner et raisonner. Dans Imagination morte imaginez, la voix narrative convie le lecteur à s’impliquer personnellement dans la fiction, comme lorsqu’elle décrit les corps qui semblent inertes : « Présentez une glace aux lèvres, elle s’embue »[71]. Sur ses gardes, la voix se libère de sa propre narration, reléguant au lecteur la responsabilité d’animer ces êtres. Alors qu’elle tente de couper court à toute forme d’imagination, ses derniers mots, « et sinon ce qu’ils font »[72], suggèrent justement qu’elle n’est pas parvenue à réprimer la faculté d’invention des lecteurs. Au contraire, ces derniers sont désormais libres d’imaginer l’existence de ces êtres en dehors du livre, ce qui marque au final le triomphe de la fiction littéraire : « Et peu à peu, l’on assiste à une renaissance de l’imagination, ou plutôt à l’enfantement par l’imagination de quelque chose que le narrateur n’avait pas prévu : tout à la fois une fiction et une signification – bref, de la littérature »[73]. Avec la déconstruction de l’univers narratif, le lecteur se voit attribué un rôle actif, celui de prendre part au texte qui s’esquisse sous ses yeux, pour lui donner vie à travers son imagination personnelle. En effet, si l’artiste cherche à capter les images dans leur essence pure, c’est le regard du récepteur qui empêche les œuvres de tomber dans le néant, comme le notait justement le jeune Beckett dans son essai sur la peinture des frères van Velde :

Achevé, tout neuf, le tableau est là, un non-sens. Car ce n’est qu’un tableau, il ne vit encore que de la vie des lignes et des couleurs, ne s’est offert qu’à son auteur. Rendez-vous compte de sa situation. Il attend, qu’on le sorte de là. Il attend les yeux, les yeux qui, pendant des siècles, car c’est un tableau d’avenir, vont le charger, le noircir, de la seule vie qui compte, celle des bipèdes sans plumes.[74]

Beckett rompt avec la tradition des arts représentatifs et cherche à bouleverser les habitudes des lecteurs, afin de les mener à appréhender les œuvres avec un regard neuf sans a priori. Son art défie ainsi la raison pour s’adresser à la sensibilité et réactiver avec elle une forme d’imagination première, primitive. De fait, les œuvres beckettiennes sont chargées d’images en puissance : elles contiennent en elles-mêmes des visions saisies dans le suspens de l’écriture et susceptibles de se déployer en autant d’images qu’il existe de lecteurs et de contextes de réception. Cependant, en se désengageant de son œuvre, l’auteur laisse au lecteur la responsabilité de la fiction, lui cédant aussi le droit de détruire cet univers et toutes les images qu’il véhicule.

L’Image, Comment c’est et Imagination morte imaginez s’élaborent finalement autour d’un mouvement dialectique de construction et de déconstruction de l’univers narratif. L’imagination créatrice de l’auteur plonge tout d’abord les lecteurs dans un monde neuf, sans rapport a priori avec la réalité. Mais si cette faculté d’invention est bridée, elle n’en demeure pas moins fondée sur des bribes d’images enfouies dans la conscience du créateur. Dans les œuvres ainsi ébauchées, le dispositif narratif permet de « désimaginer » chaque fois que le texte se met à représenter. Malgré son intention d’enrayer le processus imaginatif, la narration finit par nourrir l’esprit du lecteur, lui donnant la possibilité d’inventer à son tour et finalement d’achever la fiction, qui avait été construite et aussitôt déconstruite sous ses yeux. Cependant, le lecteur ne peut avoir ce rôle actif dans la finition de l’œuvre qu’en s’éloignant de ses habitudes de réception pour soustraire sa pensée à l’exercice de la raison, faisant ainsi « déraisonner » son imagination à la suite de celle de l’auteur. Ces expériences narratives montrent que, même quand les composantes traditionnelles de l’écriture romanesque que sont le lieu et le temps sont définitivement supprimées – notamment avec L’Innommable – la voix narrative demeure irréductible et, avec elle, l’imaginaire qu’elle véhicule nécessairement.

Charlotte Richard

Doctorante, Cielam, 19-21, Aix-Marseille Université

Bibliographie

BECKETT Samuel, All strange away in Samuel Beckett: the Complete Short prose, ed. Stanley Gontarski, New York, Grove press, 1996.

—, Comment c’est, Paris, Éditions de Minuit, 1961.

—, Imagination morte imaginez in Têtes-mortes, Paris, Éditions de Minuit, 1972,

—, Le monde et le pantalon, Paris, Éditions de Minuit, 1989.

—, L’Image, Paris, Éditions de Minuit, 1988.

—, L’Innommable, Paris, Éditions de Minuit, coll. « Double » n. 31, 2004.

CLEMENT Bruno, L’œuvre sans qualités. Rhétorique de Samuel Beckett, Paris, Seuil, 1994.

—, « Nébuleux objet (à propos de …but the clouds…) » dans Catharina Wulf (dir.), The Savage Eye. L’Œil fauve., Samuel Beckett Today/Aujourd’hui, Amsterdam ; Atlanta, Rodopi, 1995, p. 97.

HUBERT Marie-Claude (dir.), Dictionnaire Beckett, Paris, Honoré Champion, 2011.

KNOWLSON James, Beckett, traduit par Oristelle Bonis, Arles, Actes Sud/Babel n. 838, 2007.

KNOWLSON James, PILLING John, Frescoes of the skull: the later prose and drama of Samuel Beckett, Londres, John Calder, 1979.

LEGER Nathalie, ALPHANT Marianne, Beckett, Objet, catalogue de l’exposition Beckett au Centre Pompidou, dirigé, Anvers, IMEC éditeur, 2007.

 

POUR CITER CET ARTICLE  Charlotte Richard, « L’imagination déraisonnante dans l’univers narratif de Samuel Beckett », Nouvelle Fribourg, n. 2, novembre 2016. URL : https://www.nouvelle-fribourg.com/archives/limagination-deraisonnante-dans-lunivers-narratif-de-samuel-beckett/ 

 

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NOTES

1 Eric Wessler, « L’Innommable » dans Marie-Claude Hubert (dir.), Dictionnaire Beckett, Paris, Honoré Champion, 2011, p. 521. Cf. Samuel Beckett, L’Innommable, Paris, Éditions de Minuit, coll. « Double » n. 31, 2004.

2 Ibidem.

3 Lettre de Beckett à A.J. Leventhal du 3 févirer 1959, citée par James Knowlson, Beckett, traduit par Oristelle Bonis, Arles, Actes Sud/Babel n. 838, 2007, p. 743.

4 Samuel Beckett, Comment c’est, Paris, Éditions de Minuit, 1961.

5 James Knowlson, Op.cit., p. 744.

6 Samuel Beckett, L’Image, Paris, Éditions de Minuit, 1988.

7 « C’est un exercice de “défamiliarisation” bien plus long et éprouvant qu’aucun autre texte en prose substantiel de Beckett, mais c’est aussi un ouvrage qui met à nu ses principes directeurs avec une désinvolture désarmante », traduction de l’auteur. James Knowlson, John Pilling, Frescoes of the skull: the later prose and drama of Samuel Beckett, Londres, John Calder, 1979.

8 Samuel Beckett, Imagination morte imaginez in Têtes-mortes, Paris, Éditions de Minuit, 1972.

9 Lettre de Samuel Beckett à Lawrence Harvey du 30 janvier 1965, citée par James Knowlson, Op. cit., p. 855.

10 Lettre de Samuel Beckett à Avigdor Arikha, Ibidem.

11Lettre de Samuel Beckett à Axel Kaun du 9 juillet1937, traduite de l’allemand par Bernard Hœpffner, dans Marianne Alphant, Nathalie Léger, Beckett, Objet, catalogue de l’exposition Beckett au Centre Pompidou, dirigé, Anvers, IMEC éditeur, 2007, p. 15.

12 Ibidem.

13 Anne-Cécile Guilbard, « Image » dans Marie-Claude Hubert (dir.), Op.cit., p. 507.

14 Ibidem.

15 Eric Wessler, « Imagination morte imaginez » dans Marie-Claude Hubert (dir.), Op. cit., p. 514.

16 Samuel Beckett, All strange away in Samuel Beckett: the Complete Short prose, ed. Stanley Gontarski, New York, Grove press, 1996.

17 Stanley Gontarski, « All strange away » dans Marie-Claude Hubert (dir.), Op.cit., p. 32.

18 Ibid., p. 33.

19 Samuel Beckett, Imagination morte imaginez, Op.cit., p. 51.

20 Ibid., p. 52.

21Lettre de Beckett à Donald McWhinnie du 6 avril 1960, citée par James Knowlson, Op.cit., p. 744.

22 Samuel Beckett, Comment c’est, p. 16.

23 Samuel Beckett, L’Image, p. 9.

24 Ibid., p. 18.

25 Samuel Beckett, Comment c’est, p. 41.

26 Ibidem.

27 Samuel Beckett, L’Image, p.11.

28 Ibid., p. 13.

29 Ibid., p. 16.

30 Ibid., p. 17.

31 Samuel Beckett, Comment c’est, p. 44.

32 Ces images évoquées p. 42 sont reprises p. 44.

33 Samuel Beckett, L’Image, p. 18.

34 Samuel Beckett, Comment c’est, p. 48.

35 Bruno Clément, « Nébuleux objet (à propos de …but the clouds…) » dans Catharina Wulf (dir.), The Savage Eye. L’Œil fauve, Samuel Beckett Today/Aujourd’hui, Amsterdam ; Atlanta, Rodopi, 1995, p. 97.

36 Samuel Beckett, Comment c’est, p. 9.

37 Ibidem.

38 Ibid., p. 33.

39 Ibid., p. 97.

40 Ibid., p. 125.

41 Ibidem.

42 Stefano Genetti, « Comment c’est » dans Marie-Claude Hubert (dir.), Op.cit., p. 254.

43 James Knowlson, Op.cit., p. 854.

44 Ibidem.

45 Ibidem.

46 Ibid., p.855.

47 Samuel Beckett, Imagination morte imaginez, p.57.

48 Ibidem.

49 Bruno Clément, L’œuvre sans qualités. Rhétorique de Samuel Beckett, Paris, Seuil, 1994, p.180.

50 Ibid., p. 423.

51 Anne-Cécile Guilbard, « Image » dans Marie-Claude Hubert (dir.), Op.cit., p.507-508.

52 Samuel Beckett, Comment c’est, p. 201-202.

53 Ibid., p. 203.

54 Ibid., p. 204.

55 Ibid., p. 205.

56 Samuel Beckett, Imagination morte imaginez, pp. 52-53.

57 Ibid., p. 56.

58 Samuel Beckett, L’Image, pp. 15-16.

59 « Je crie aucun son plaque-la là et cours t’ouvrir les veines », Samuel Beckett, Comment c’est, p. 46.

60 Anne-Cécile Guilbard, « Image » dans Marie-Claude Hubert (dir.), Op.cit., p. 505.

61 Samuel Beckett, Le monde et le pantalon, Paris, Éditions de Minuit, 1989, p. 28.

62 Ibid., p. 30.

63 Samuel Beckett, Imagination morte imaginez, p. 51.

64 Ibidem.

65 Eric Wessler, « Imagination morte imaginez » dans Marie-Claude Hubert (dir.), Op.cit., p. 514.

66 Stefano Genetti, « Comment c’est » dans Marie-Claude Hubert (dir.), Op.cit., p. 250.

67 Voir note 9.

68 Samuel Beckett, Comment c’est, p. 131.

69 Stefano Genetti, « Comment c’est » dans Marie-Claude Hubert (dir.), Op.cit., p. 255.

70 Ibid., p. 256.

71 Samuel Beckett, Imagination morte imaginez, p. 56.

72 Ibid., p. 57.

73 Eric Wessler, « Imagination morte imaginez » dans Marie-Claude Hubert (dir.), Op.cit., p. 514.

74 Samuel Beckett, Le monde et le pantalon, p. 12.

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