ISSN 2421-5813

Nouvelle Fribourg, n. 3

Le genre du portrait accompagne l’histoire de l’art avec des finalités qui ont changé au cours des siècles. Très à la mode au cours du XVIIe siècle, aussi sous l’influence de la littérature précieuse, il déborde bientôt les confins d’un pur art figuratif : il suffit de penser au rôle du portrait dans le roman psychologique (comme chez Madame de La Fayette) ou au théâtre de Molière, par exemple, qui l’exploite dans la célèbre galerie dressée par Célimène dans le Misanthrope (1666).

Ensuite, il devient l’instrument remarquable des auteurs de mémoires, comme le Cardinal de Retz ou, après quelques décennies, Saint-Simon, lesquels l’utilisent pour entrecouper la narration et lui imposer une pause, un suspens. Le portrait peut bien être élogieux ou satirique, comme chez des moralistes tels que La Bruyère et La Rochefoucauld. Néanmoins, c’est au XIXe siècle que le portrait devient un genre indépendant et incontournable.

Il se définit alors selon trois critères :

  • physique, lorsqu’on considère les traits du visage, la description du corps, la posture, l’allure ;
  • psychologique et moral, si l’on se concentre sur le caractère, les sentiments et les pensées du sujet ;
  • social, quand les fréquentations, l’idéologie, les vêtements et le langage du personnage révèlent son appartenance à un milieu donné ou une attitude sociale.

De la même façon, le portrait peut avoir une fonction purement référentielle, argumentative, symbolique, esthétique, selon les exigences de qui le met en place. Enfin, de genre épidictique tout court, célébrant le pouvoir établi et nourrissant le mythe des mécènes, le portrait s’est lentement affranchi de sa fonction sociale pour devenir le moyen privilégié d’une connaissance touchant au cœur de la question du rapport entre l’extérieur et l’intérieur du sujet, aussi bien que du rapport entre le sujet et l’espace, ou entre le sujet et son milieu social.

Au XXe siècle, c’est Henri Michaux qui souligne l’importance d’une approche visuelle à la poésie en réfléchissant longuement au sujet du portrait, notamment dans Peintures et dessins (1946), où il exhorte ses semblables à utiliser l’écriture au sens pictural – comme l’instrument d’une enquête sur l’intériorité : « Homme, regardez-vous dans le papier. » La conscience de cette nécessité s’accompagne à l’abandon d’une perspective traditionnelle, centrée sur la simple reproduction de traits physiques. L’art du portrait est fécond lorsqu’il révèle le « double » au-delà des apparences extérieures : « Le visage a des traits, je m’en fiche. Je peins les traits du double (qui n’a pas nécessairement besoin de narines et peut avoir une trame d’yeux.) » Dans ce jugement personnel sur l’art littéraire du portrait, Michaux incorpore les théories sur l’inconscient, qui mettent en question la correspondance parfaite entre ce qui apparaît et ce qui est caché par les mécanismes de défense de l’individu.

Parmi tous les individus possibles, émerge donc la figure de l’artiste portraituré et auto-portraituré, ce qui ouvre à de nombreuses réflexions sur la représentation de la figure de l’artiste dans les œuvres littéraires. Les intersections entre littérature et art au XIXe et au XXe siècle permettent de considérer le portrait comme un genre transversal, adopté en tant que tel ou comme métaphore du regard vers soi. Il est notre intention de comprendre à fond les changements dans le genre du portrait en peinture entre les deux siècles et, en même temps, de comprendre dans quelle mesure un genre pictural arrive à influencer et à déterminer un sous-genre littéraire : celui du portrait de l’artiste.

Nous proposons les pistes d’analyse suivantes :

– La représentation de l’artiste dans l’univers romanesque : une longue tradition

– Photographies et portraits d’écrivains : une posture de l’artiste ?

– L’artiste caricaturé : un art fleurissant au XIXe siècle

– Représentations de l’artiste et changement de son rôle social

– Pour une théorie du portrait en peinture au XXe siècle

– La représentation de l’artiste par les avant-gardes : un thème pictural ?

– L’autoportrait : un autre genre littéraire ?

– Le tombeau, genre commémoratif

– Portraits hors l’Hexagone : identités de l’artiste francophone

– …

Calendrier 

Date limite pour la remise des propositions :

31 mai 2017

Date limite pour la remise des contributions :

30 septembre 2017

Vous pouvez envoyer vos propositions de titre accompagnées de 10 lignes de projet et votre profil à l’adresse info@nouvellefribourg.com, avant le 31 mai 2017. Le Comité scientifique de lecture décidera dans les jours suivants et nous communiquerons ensuite les consignes éditoriales aux auteurs sélectionnés.

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