ISSN 2421-5813

La Paresse

Dans Fulgurations, Gare

de Henri Michaux

L’âme adore nager. Pour nager on s’étend sur le ventre. L’âme se déboîte et s’en va. Elle s’en va en nageant. (Si votre âme s’en va quand vous êtes debout, ou assis, ou les genoux ployés, ou les coudes, pour chaque position corporelle différente l’âme partira avec une démarche et une forme différentes c’est ce […]

Aide-Mémoire

Dans Fulgurations, Gare

de Michel Deguy

Ce qui a lieu d’être Ne va pas sans dire Ce qu’on ne peut pas dire… Il faut l’écrire La partie donne sur le tout Qui donne la partie Savoir à quoi ça ressemble C’est notre savoir — non absolu Il faut de la semblance Pour faire de la contiguïté Le poème est des choses […]

Langue maternelle (Strophe)

Dans Fulgurations, Gare

de Jacques Réda

Plus  de  quarante  ans  ont  passé  :  deux  jours  avant Noël,  au  dos  d’une  carte  postale  représentant  la  cathé- drale  de  Metz  il  écrivait  : Tu  sais  mon  Vieux  Robert  quand  on  est  au  régiment  l’on change  de  caractère et  tout  en  bas  : Je  ne  vois  plus  rien  à  vous  dire  car  la  soupe […]

À Leopardi

Dans Fulgurations, Gare

de Alain Jouffroy

À  jamais  tu  te  réveilleras, Cœur  plus  léger,  sans  bosse.  Vie  est  la  première  certi- tude Que  l’on  croit  impensable.  Vie.  Mais  je  sais Qu’en  toi  d’exécrables  visions, Non  seule  l’appréhension,  mais  le  besoin  a  expiré. Tu  veilles  à  jamais.  Tu  as  combattu,  mais  comme  moi, Pas  assez.  Toute  chose,  pourtant,  et  tu  l’as  su, […]

Pensées sous les nuages

Dans Fulgurations, Gare

de Philippe Jaccottet

— Je ne crois pas décidément que nous ferons ce voyage à travers tous ces ciels qui seraient de plus en plus clairs, emportés au défi de toutes les lois de l’ombre. Je nous vois mal en aigles invisibles, à jamais tournoyant autour de cimes invisibles elles aussi par excès de lumière . . . […]

L’irruption des mots

Dans Fulgurations, Gare

de André Frénaud

Je ris aux mots. J’aime quand ça démarre, qu’ils s’agglutinent, et je les déglutis comme cent cris de grenouille en frai. Ils sautent et s’appellent, s’éparpillent et m’appellent et se rassemblent et je ne sais si c’est Je qui leur réponds ou eux encore dans un tumulte intraitablement frais qui vient sans doute de nos […]

Liens

Dans Fulgurations, Gare

de Guillaume Apollinaire

Cordes faites de cris Sons de cloches à travers l’Europe Siècles pendus Rails qui ligotez les nations Nous ne sommes que deux ou trois hommes Libres de tous liens Donnons-nous la main Violente pluie qui peigne les fumées Cordes Cordes tissées Câbles sous-marins Tours de Babel changées en ponts Araignées-Pontifes Tous les amoureux qu’un seul […]

Nous avons

Dans Fulgurations, Gare

de René Char

Notre parole, en archi­pel, vous offre, après la dou­leur et le désastre, des fraises qu’elle rap­porte des landes de la mort, ainsi que ses doigts chauds de les avoir cherchées. Tyran­nies sans delta, que midi jamais n’illumine, pour vous nous sommes le jour vieilli ; mais vous igno­rez que nous sommes aussi l’œil vorace, bien […]

Tu as bien fait de partir, Arthur Rimbaud !

Dans Fulgurations, Gare

de René Char

Tes dix-huit ans réfractaires à l’amitié, à la malveillance, à la sottise des poètes de Paris ainsi qu’au ronronnement d’abeille stérile de ta famille ardennaise un peu folle, tu as bien fait de les éparpiller aux vents du large, de les jeter sous le couteau de leur précoce guillotine. Tu as eu raison d’abandonner le […]

Bords de mer

Dans Fulgurations, Gare

de Francis Ponge

La mer jusqu’à l’approche de ses limites est une chose simple qui se répète flot par flot. Mais les choses les plus simples dans la nature ne s’abordent pas sans y mettre beaucoup de formes, faire beaucoup de façons, les choses les plus épaisses sans subir quelque amenuisement. C’est pourquoi l’homme, et par rancune aussi […]

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